Main Menu

Recherche

Traduction automatique

Contes



Détente




Détente / Contes / Arabe

DJEHA ET TAMERLAN N° : 38

Djeha, Tamerlan et le tir à l'arc



Chaque fois que Tamerlan s’ennuyait avec ses courtisans, toujours à faire des courbettes et des bassesses, il éprouvait du soulagement dans la compagnie de Djeha. Un jour, il demanda à Djeha de l’accompagner au champ de tir à l'arc.
- Quel bon tir ! Dit Djeha alors que la flèche d'un soldat perçait l'œil du taureau de la cible. Il me rappelle la manière dont je maniais l'arc.
- Vraiment ? Dit Tamerlan, surpris par ces propos. Je n'ai jamais entendu dire que tu as été archer.
- Oh oui, en effet ! J'ai été un archer célèbre. Je me souviens que des hommes venaient de villes lointaines pour me voir tirer à l’arc.
- Mes soldats tireront certainement profil d'une démonstration de quelques bons tirs, dit Tamerlan qui appela alors un soldat et lui emprunta son arc et ses flèches, pour les donner à Djeha.
- Voilà une bonne occasion de nous montrer ton savoir-faire.
- Oh ! Dit Djeha, vous ne devez pas priver votre soldat de l’occasion de s’entraîner. Il en a tellement plus besoin que moi. Ce à quoi Tamerlan répondit :
- Ta démonstration lui sera beaucoup plus profitable que le temps qu'il est censé perdre.
- C'est qu’il y a si longtemps que je n’ai pas tiré à l'arc, dit Djeha. Il est préférable de ne pas le faire aujourd'hui.
- Oh ! Cela te reviendra dès que tu sentiras l’arc entre tes mains. Donnant l'exemple, Tamerlan met une flèche en place, tend l’arc et envoie la flèche en plein dans le mille.
- Regarde ! Cela fait des mois que je n'ai pas eu un arc entre mes mains, mais je me sens comme si j'avais tiré hier. A toi maintenant.
- Peut-être devrai-je attendre jusqu'à ce que cette coupure sur mon doigt guérisse, dit Djeha qui essayait de changer de sujet.
- Le doigt ne doit pas toucher l’arc ou la flèche, s'entêta à lui dire Tamerlan.
- Vous oubliez la douleur à l’épaule qui m'a gêné tout l'hiver, rétorqua Djeha, qui s’accrochait à tout ce qui pouvait contribuer à tenir arc et flèche hors de sa portée.
- Tu as dit ce matin que le soleil printanier d'aujourd'hui avait fait disparaître cette douleur, dit Tamerlan, en tendant fermement l’arc et une flèche vers Djeha.
Djeha savait reconnaître un ordre - et un ordre de Tamerlan était vraiment un ordre. Il essaya d’apparaître désinvolte dès qu’il prit l’arc entre ses mains maladroites. Un regard rapide à un soldat lui a indiqué la façon de le tenir. Après deux ou trois essais, il ajusta la flèche pour la diriger vers la cible. Il tendit la corde et ferma les yeux. La flèche tomba mollement à quelques centimètres de ses pieds. Tamerlan s'attendait à voir Djeha navré ou embarrassé. Pas du tout ! Un sourire désinvolte éclaira son visage et il dit :
- Ce que je voulais vous montrer, c’est la manière dont tire votre maître de chasse.
Djeha prit une autre flèche des mains du soldat et répéta l’exercice, la flèche ne dépassant pas, cette fois, l’aire de départ !
- Et cela, dit Djeha, c’est pour vous montrer comment tire votre gouverneur.
Djeha prit une troisième flèche et l'ajusta. Cette troisième flèche alla certes plus loin, mais nettement à droite de la cible.
- Et cela, dit Djeha, vous montre comment tire votre général.
Djeha prit une quatrième flèche, ferma les yeux et tira au hasard. Et, à sa grande surprise, elle se logea
exactement au centre de la cible.
- Dieu soit loué ! Murmura Djeha qui ajouta à l’intention de Tamerlan,
- et cela, pour vous montrer comment Djeha tire.

Détente / Contes / Arabe

DJEHA ET TAMERLAN N° : 39

La cuisse manquante



Djeha marchait à grands pas par les rues d'AkShehir, une main saisissant fermement l'oie rôtie mise sous son bras, l'autre main pinçant son propre nez pour le tenir fermement serré. Il n'avait aucune confiance en lui et ne voulait pas prendre le risque de voir l'arôme de l'oie rôtie le tenter. L'oie était un présent pour Tamerlan et devait arriver entière à son destinataire.

Une mouche se posa sur le front de Djeha. Il ôta la main de son nez, juste le temps de chasser la mouche, mais l'arôme épicé de l'oie rôtie envahit ses narines. Il s'est souvenu qu'il y avait longtemps qu'il n'avait goûté de l'oie rôtie. Après tout, il y avait beaucoup à manger au palais de Tamerlan. Ce dernier ne sera pas privé, s'il ne manquait qu'un tout petit bout d'oie, une cuisse bien dodue, par exemple.

Tout en grignotant un morceau de la volaille, il ne pouvait pas s'empêcher de se demander ce que Tamerlan penserait d'une oie rôtie avec une seule cuisse. Peut-importe. Il s'en inquiétera le moment venu. La succulente cuisse qu'il était en train de déguster valait n'importe quel ennui ultérieur. Djeha trouva Tamerlan tout à fait de bonne humeur et heureux d'avoir de la compagnie. Il sembla reconnaissant de recevoir une oie aussi succulente, comme si les gigantesques étagères de son garde-manger étaient vides. Il a tourné l'oie à plusieurs reprises, pour mieux admirer ses rondeurs.
- Quelle cuisinière que ta Kalima ! S'exclama Tamerlan. Personne, dans mes cuisines, ne peut rôtir une oie avec une telle perfection !
- Oui, acquiesça Djeha, Kalima est effectivement une excellente cuisinière. Il disserta longuement sur les pilafs de Kalima, les potages de Kalima, les dolmas de Kalima, les baklavas
de Kalima. Il parlait rapidement, pour que Tamerlan ne remarque pas l'absence de la cuisse.
- C'est étrange - très étrange ! Dit Tamerlan en regardant attentivement l'oie. Cette oie n'a qu'une seule cuisse.
- Pour être sûr ! Répliqua Djeha, à combien de cuisses vous attendiez-vous ?
- Deux, bien sûr !
- Deux cuisses ? Rétorqua Djeha. Pas à AkShehir. Dans d'autres villes, les oies peuvent avoir deux cuisses ou trois ou même quatre, mais celles d'AkShehir sont célèbres pour être unijambistes.
- Comment peux-tu me mentir ainsi ? Tamerlan se leva, sa bonne humeur ayant disparu comme la cuisse de l'oie. Tu sais aussi bien que moi ce qui est arrivé à l'autre cuisse. Des oies unijambistes d'AkShehir, vraiment !
- Bien, si vous ne me croyez-pas, venez constater par vous-même. Djeha le dirigea vers la fenêtre.
- Voyez les célèbres oies unijambistes d'AkShehir près de votre propre fontaine.
Tamerlan regarda dans la direction indiquée par Djeha. Près de la fontaine - pouvait-il vraiment le croire ? - il vit une douzaine de grandes oies blanches dormir au soleil, chacune fermement perchée sur un seul pied.
- Combien de pieds voyez-vous ? Demanda Djeha. Je compte douze oies et douze pieds. Pouvez-vous en compter plus ?
- Non ! Avoua Tamerlan.
Bien que perplexe, il n'avait jamais remarqué cela auparavant. Il était trop préoccupé par les guerres et les affaires de gouvernement pour remarquer les oies.
- Les oies de mon village d'enfance en Asie avaient bien deux pieds chacune, j'en suis sûr.
- C'est parfaitement possible ! Conceda Djeha. Mais nous ne sommes pas dans votre village d'enfance. Ici, c'est AkShehir, le siège des oies unijambistes. Cependant inquiet, Djeha s'apprêtait à partir. Juste à ce moment, un chameau qui dormait près de la fontaine s'est relevé et a poussé des cris rauques et perçants. Les douze oies se sont réveillées de leur torpeur, chacune dépliant le pied mis sous son aile. Avec une grande agitation, elles se sont dispersées, chacune courant sur deux pieds. Au moment où Tamerlan reprenait ses esprits, Djeha était déjà en bas dans la cour, au-dessous de sa fenêtre. Tamerlan se mit à la fenêtre et appela Djeha. Mais ce dernier, sans comprendre ce que Tamerlan lui disait, avait déjà préparé sa réponse.
- Mon bon Tamerlan, cria- t-il, juste avant que la porte de palais ne s'ouvre pour le laisser passer, si vous ou moi avions eu les oreilles envahies par un tel raffut – alors que nous étions endormis, ne pensez-vous pas qu'il nous serait poussé au moins quatre pieds !