Contes
Nasreddin HODJA est un ouléma mythique de la culture musulmane, personnage
ingénu et faux-naïf prodiguant des enseignements tantôt absurdes tantôt
ingénieux, qui aurait vécu en Turquie de 1208 à 1284, né à Sivrihisar et mort à
Aksehir. Sa renommée va des Balkans à la Mongolie et ses aventures sont
célébrées dans des dizaines de langues, du serbo-croate au persan en passant par
le turc, l'arabe, le grec, le russe et d'autres.
Son personnage s'est fondu à celui de Joha (au Maghreb) Jha, Djha ou Djouha.
Le personnage de Joha (en Égypte il s'appelle Goha, en Turquie il s'appelle
Nasreddin Hoca (prononcer Hodja) préexistait à celui de Nasr Eddin Hodja sans
que l'on puisse clairement déterminer l'origine de ce personnage du monde
arabo-musulman.
En Iran et Azerbaïdjan, on l'appelle Mollah Nasreddin et en Asie centrale
Appendi (du turc efendi : monsieur), mais ce sont toujours les mêmes aventures
que l'on raconte à son propos. Ses histoires courtes sont morales, bouffonnes,
absurdes ou parfois coquines. Une partie importante d'entre elles a la qualité
d'histoire enseignement.
Nasr Eddin vit en général à Akhehir (Turquie) où il a sa tombe canular vide. Ses
histoires ont parfois pour protagonistes le terrible conquérant Tamerlan (Timour
Lang), pour qui il joue le rôle de bouffon insolent bien que la situation soit
anachronique. D'autres histoires mettent en scène son âne et sa première femme
Khadidja ; il exerce parfois la fonction de Cadi voire d'enseignant dans une
médersa.
Il aurait vécu au VIIIe siècle à Koufa, un village d'Irak mais deux tombes
existeraient : l'une dans un village d'Anatolie et l'autre en Algérie.
Détente / Contes / Arabe
Djeha rentre chez lui, contrarié par une mauvaise journée. Et pour une bagatelle, le voilà qui se dispute avec sa femme :
- J'en ai assez, je m'en vais, je quitte la maison !
Affolée et désemparée, sa femme lui court après en demandant :
- Où vas-tu ? Dis-moi au moins où tu vas aller...
Djeha claque la porte, sans répondre et s'en va. Une fois dehors, il arrête une calèche qui arrivait et s'installe sans rien dire.
- Bonjour, Djeha, où veux-tu aller, lui demanda le cocher
- Comment ça, où je veux aller. Je ne l'ai même pas dit à ma femme et tu veux que je te le dise à toi !
Détente / Contes / Arabe
Djeha et sa femme paressaient au lit et aucun d'eux n'avait envie de se lever.
- Kalima, dit Djeha, va voir dehors s'il pleut encore ?
- Non, le temps est sec, sinon tu entendrais le bruit de la pluie sur le toit.
- Alors, lève-toi pour mettre une bûche dans le feu.
- Tu ne vois pas d'ici qu'il reste encore des braises dans la cheminée ?
- Je vois que tu n'as aucune envie de te lever. Puisque tu as réussi à faire deux tâches sans sortir du lit, dis-moi comment tu comptes t'acquitter de la troisième ?
- Laquelle ? Interrogea Kalima
- Traire la chèvre qui se trouve dans la cabane, au bout du jardin.
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En voyant sa femme pleurer sans aucune raison, Djeha lui demanda
- Que t'est-il arrivé ?
Sa femme, séchant ses larmes, lui répondit :
- Je me suis souvenu de ma pauvre mère. Elle aimait tellement ce potage. C'est elle qui m'a appris à le faire.
Djeha connaissait sa belle-mère et avait beaucoup de respect pour elle. Donc il n'a rien dit. Il a pris une cuillerée de potage et l'a avalée. Ses yeux se sont alors remplis de larmes.
- Qu'est-ce qui se passe ? Lui dit sa femme. Pourquoi pleures-tu ainsi ?
- Je pleure, dit Djeha, parce que c'est toi qui aurais du être morte au lieu de ta pauvre mère.
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La femme de Djeha n'était facile à vivre. Elle le harcelait constamment et Djeha en avait plus qu'assez.
Durant un de ses sermons, il parla des épouses acariâtres et il put vider son cœur à souhait. Quand il eut fini, il se sentit mieux et demanda aux hommes de l'assistance qui avaient des femmes acrimonieuses de se lever. Tous se levèrent, ce dont il fut surpris. Un de ses amis lui dit :
- Djeha, tu es le seul à ne pas te lever ! Tu dois donc être très heureux avec ta femme !
- Oh non ! Répondit Djeha. J'allais me lever avant quiconque quand j'en ai été empêché. J'ai été tellement déconcerté par le nombre de personnes concernées que mes jambes se sont mises à trembler, à tel point que je ne pouvais même plus bouger.
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Une grande controverse avait divisé le village en deux. On en appela à Djeha pour résoudre le problème. Sa femme l'avertit que cela pourrait se retourner contre lui. Conscient de ses responsabilités, Djeha ne pouvait se dérober. Il alla à la place du marché et fit face aux villageois réunis en deux clans opposés. Le leader et quelques voix du premier groupe lui crièrent de s'assurer qu'il avait bien compris leur point de vue. Après les avoir écoutés, il leur dit :
- Vous avez raison.
Les partisans du second groupe le menacèrent de leur poing pour le convaincre de la validité de leur point de vue. Il les écouta et leur dit :
- Vous avez raison aussi.
Sa femme le tira par la manche et lui souffla qu'ils ne pouvaient pas avoir raison tous les deux.
- Tu as raison toi aussi, lui répondit-il.
Détente / Contes / Arabe
Djeha était déterminé à être plus entreprenant. Un jour, il dit à sa femme qu'il alla